Culture Livres #50

Quand les nuages poursuivent les corneilles
Les âmes simples et rêveuses ne sont pas faites pour la réalité – mais cela, Roman ne le sait pas. Alors il persévère, entretient des émotions amoureuses, des projets artistiques, des utopies légères, et surnage comme il peut pour le reste, qui est parfois assez lourd. Avec le non-conformisme ironique et décalé qu’on lui connaît, Matthias Zschokke restitue tout en tendresse l’univers de ce ludion aux prises avec le monde, qu’il regarde avec une affection cocasse et étonnée, étranger à la révolte et fidèle à sa petite musique intérieure…
Matthias Zschokke, Zoé, 2018, CHF 29.50

Ambassadrice de la marque
Le premier roman de Joséphine de Weck exprime subtilement le flottement, mi-plaisant mi-vain, que représentent ces dix jours pour une jeune femme engagée comme hôtesse au Salon de l’Auto de Genève. Le public défile, échantillon d’humanité qui la surprend, l’amuse, la laisse perplexe aussi. Elle s’ennuie un peu, ce qui lui laisse le loisir de penser à son microcosme familial. Quant à ses jeunes collègues… Rapide, légèrement ironique et finement analysé, le récit de ce voyage immobile est lisse et brillant, comme une belle carrosserie. L’auteure est d’ailleurs allée dédicacer son roman au Salon de l’Auto!
Joséphine de Weck, L’Âge d’Homme, 2018, CHF 24.70

Les Morts
Tout est fictif, tout aurait pu être vrai: l’idée de doubler l’axe politique entre Berlin et le Japon de liens culturels, de confier la tâche à un agent neutre, c’està- dire suisse. C’est ainsi que Nägeli, cinéaste imaginaire, se retrouve dans le Tokyo des années 1930 à (tenter de) réaliser un film-symbole. Mal dans sa peau, tout comme son interlocuteur japonais, il peine à se repérer dans une atmosphère toxique… Intriguant, dérangeant, cet épisode noir est irrigué par le venin de l’irrésolution: seul le cinéma brille parmi ces Morts, sacrant – déjà – la suprématie de l’image.
Christian Kracht, Phébus, 2018, CHF 30.60

Vesoul, le 7 janvier 2015
Tout de ce livre attire l’attention: le nom de Quentin Mouron, que l’on attend toujours avec grande curiosité, la date, qui évoque forcément les terribles attentats parisiens, et Vesoul, à jamais tirée de l’anonymat par Brel… Le cocktail, on s’en doute, est détonant, iconoclaste et roublard! Et l’errance improbable du narrateur, légèrement dépassé par les événements, et de son guide autoproclamé Saint-Preux à travers les clichés branchés du siècle est d’un cynisme allègre, qui rappelle le style (pourtant réputé inimitable) du Sucre de Georges Conchon.
Quentin Mouron, Olivier Morattel, 2019, CHF 28.10

#ATable avec Qooking
Qui dit cuisine dit partage, générosité et plaisir. Et c’est bien ce qu’exprime cet ouvrage haut en couleur et en saveur. Rempli de recettes à se relever la nuit et de superbes illustrations gourmandes, il ne peut que mettre l’eau à la bouche. Mais ce qui plaît encore davantage, c’est cette vision de la cuisine véhiculée par Qooking et tous les «Qookers» qui ont participé en ligne au projet: la cuisine est un reflet du monde qui nous entoure, elle rassemble, elle est communautaire. Et ça, par les temps qui courent, ça fait du bien!
Collectif, Favre, 2018, CHF 25.–


EN VENTE DANS LES LIBRAIRIES PAYOT. www.payot.ch