The show must go on!

Emma Mylan le sait. Pour vivre intensément, elle doit sortir des sentiers battus. A 14 ans, elle quitte le nid familial, rejoint l’école de la rue, danse avec le feu au sens propre comme au figuré, s’affranchit des normes et fait du burlesque un art de vivre. Si la belle Eurasienne excelle dans l’art de l’effeuillage, Emma a aussi l’âme d’une meneuse… Et pas seulement de revue!

A quel moment le burlesque entre-t-il dans votre vie?
A 18 ans, je monte une troupe uniquement composée de filles. N’ayant pas vraiment de modèle féminin à partir duquel me construire, c’est avec elles que je commence à enfiler des costumes sexy et à jouer avec ma féminité, mais le vrai tournant a lieu avec mon engagement au Palais Mascotte. Un lieu mythique à Genève! Créer des spectacles était, à 21 ans, une expérience hors norme qui m’a beaucoup apporté et aussi beaucoup usée…

Qu’est-ce qui vous séduit dans cet univers?
Une vision très personnelle des numéros. Il y a presque autant de définitions du burlesque qu’il y a d’artistes qui l’exploitent. C’est une scène où l’expression est très libre. J’aime sa dimension poétique et l’autodérision qu’il exige.

En incarnant les pin-up des années 50, ne craignez-vous pas de vous mettre les féministes à dos?
Je crois que c’est justement parce qu’elles ont pris le pouvoir sur leur féminité que certaines embrassent le burlesque. La révolution sexuelle était nécessaire, mais elle a aussi entraîné l’avènement de la pornographie. Dans les années 70, sous prétexte de se libérer, les corps dénudés s’exposaient à tout-va, jusqu’aux années 2000 où la pudeur a fait son grand retour. Il y avait de quoi confondre féminité, séduction et sexualité…

Pensez-vous qu’on a perdu une certaine forme d’élégance ou de féminité depuis?
Ce n’est pas la révolution sexuelle qui a conduit à cette perte de féminité, mais plutôt le regard porté sur une féminité choisie. Dans les années 50, la question ne se posait pas, toutes les femmes portaient des jupes et des talons hauts. Ce que je remarque, depuis qu’on a le choix d’en porter, c’est qu’on est très vite cataloguée lorsqu’on choisit de mettre une jupe! Au lieu d’être libérées, les femmes d’aujourd’hui sont au contraire pleines d’interdits par peur d’être jugées…

L’idée de fonder une école burlesque est-elle née de cette réflexion?
En partie, oui. Au Palais Mascotte, j’ai appris à me débarrasser de mes complexes et à m’accepter telle que je suis. Voilà ce que j’essaie de transmettre. Peu importe le complexe physique, la raison pour laquelle on n’a pas confiance en soi, on en revient toujours à cette nécessité de se défaire des normes pour se libérer de la pression extérieure et faire ce que nous dicte le coeur. C’est cette expérience que je veux partager.

Comment appréhende-t-on de vieillir quand on a fait de sa silhouette son fond de commerce?
Devenir une vieille dame ne me fait pas peur, au contraire! La féminité évolue toute la vie et se reconsidère constamment. Vous savez, à force de trafiquer mon image, j’ai bien failli m’égarer… Il y a finalement un équilibre constant à trouver entre intérieur et extérieur pour être en paix avec soi-même!


1999: Départ de la maison. «Je croque ma liberté à pleines dents. La rue est un terrain de jeu.»
2008: Prend la direction artistique du Palais Mascotte. «Deux ans là-bas, c’est comme dix ans de notre espace-temps!»
2012: Fonde l’école Secret Follies Boudoir. «Un vrai laboratoire d’expériences féminines…»
2023: Monte des spectacles en milieu naturel, «loin des artifices, de la ville, des lumières et des paillettes».

www.secretfollies.com